Ma peinture c’est du rock !
« Ma peinture c’est du rock ! »
« Imbibé de rock comme on peut l’être d’excellents flacons mais aussi de breuvages plus incertains, Combas invente le film de nos vies, l’amour et le sexe, la guerre et l’effroi, l’ascension et la chute, la quête du stable et la fragilité du calme… Mais surtout, par ses personnages inventés, détournés ou maltraités, par ses couleurs et ses mots, ces derniers sublimés dans des titres et textes-légendes qui n’appartiennent qu’à lui, Combas, en merveilleux metteur en scène ironique sans jamais être blasé, raconte nos vies, nos rêves, nos cauchemars, nos fantasmes. C’est l’enfance toujours recommencée, le fil de nos vies jamais rompu, même si quelquefois un peu lâche, du rock au rock en passant par la peinture, la sculpture, la bande dessinée, le ciné, la photo et la poésie. » (Jean-Michel Masqué)
Rhône-Alpes, février 2012, me voilà de retour dans ma région natale pour quelques jours de vacances en famille. Au gré de mes pérégrinations, je me retrouve dans le 6ème arrondissement de Lyon, précisément en bordure du Parc de la tête d’or.
Cet hiver là j’use les semelles de mes DcMartens au Musée d’Art Contemporain, appelé macLYON, à l’occasion de la superbe exposition Greatest Hits, rétrospective sur l’œuvre de Robert Combas.
Cette grande rétrospective est un vrai régal pour mes pupilles et source d’inspiration à bien des égards. Superbe occasion de redécouvrir l’œuvre de Combas dans des conditions idéales, je décide d’y passer toute la journée !
Ce mois-ci je vous propose donc de (re)visiter avec moi cette rétrospective, histoire de faire une séance de chromothérapie et retrouver du peps en ces temps, disons-le, un peu étrange. Un article plutôt long, mais très illustré et enrichi des titres-légendes humoristiques dont seul Combas a le secret.
« En tout cas, je ne sais pas si j’aurai à nouveau une autre expo comme celle-là après. Mais celle-là, c’est celle qu’il ne faut pas rater. » (Robert Combas)
Cette rétrospective s’accompagne d’une publication bilingue (français/anglais) richement illustrée, éditée par Somogy. Une préface de Thierry Raspail, directeur du Musée d’art contemporain de Lyon, et un texte de Richard Leydier, commissaire de l’exposition, ouvrent le catalogue. Les thèmes récurrents et primordiaux de l’œuvre de Robert Combas sont abordés par des auteurs de référence : le philosophe Michel Onfray ; le parolier du groupe Bijou Jean- William Thoury ; le critique rock Stéphane Davet ; Hiroshi Egaitsu, enseignant à la Geddai (Ecole Nationale des Beaux- arts de Tokyo) et à la Tama Art University (Tokyo), journaliste japonais et ex-DJ ; et la critique d’art américaine Linda Yablonsky (The New York Times, Art in America, Art + Auction, Artforum.com).
Pour vous accompagner tout au long de la visite virtuelle de cette rétrospective, je cite volontiers Thierry Raspail, Richard Leydier et bien d’autres dont les mots sont plus justes, plus aiguisés pour exprimer l’œuvre de Robert Combas et le contexte de cette singulière rétrospective.
Certains thèmes sont complétés çà et là, avec des notes de lectures (notamment le dossier de Presse) et l’écoute d’émissions, en fonction des œuvres qui me touchent le plus. Dans la mesure du possible j’ai précisé mes sources et vous ai indiqué une bibliographie (non exhaustive) à la fin de cet article. J’ai également illustré ce post avec plus de 130 « images » et des liens musicaux.
Enfin, une remarque très importante : aucune photo ne permet de se rendre compte de l’énergie et de la vibration qui émergent des œuvres de Combas, ni du travail muséographique de cette exposition. Je vous invite, vraiment, à voir ses œuvres «en vrai». La peinture de Robert Combas fait du bien !
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Plantons le décor !
Le Musée d’Art Contemporain de Lyon a été créé en 1984 dans une aile du Palais Saint-Pierre. En 1995 il s’installe sur le site de la Cité internationale, un vaste ensemble architectural qui se déploie sur plus d’un kilomètre en bordure du Parc de la tête d’or, au 81 quai Charles de Gaulle.
La conception de tout le site a été confié à l’architecte italienRenzo Piano. Côté parc, le musée conserve la façade de l’atrium du Palais de la Foire, réalisé par l’architecte français Charles Meysson dans les années 1920.
L’édifice de 6000m2 est composé de plusieurs niveaux, espaces modulables en fonction des projets artistiques et particulièrement adaptés aux formes d’expressions contemporaines.
Le macLYON privilégie l’actualité artistique nationale et internationale, sous toutes ses formes, avec des expositions mais aussi un large programme d’événements transdisciplinaires. Ce musée a fait le choix de renouveler très régulièrement les expositions qu’il propose. On y voit que des expositions temporaires spécialement produites pour ses espaces. Ces expositions peuvent être collectives, monographiques, constituées d’œuvres de la collection ou de prêts… Raison pour laquelle le musée ferme lors des montages entre 2 périodes d’exposition.
Le contexte des 80’s
Robert Combas est le porte-pinceau d’une génération, celle qui avait 20 ans autour de 1980. Bien que l’ensemble de son œuvre couvre une période allant bien au-delà des seules années 80, il me semble important d’avoir à l’esprit le contexte extrême et très contrasté du monde des 80’s.
Sur le plan technique et technologique les innovations sont nombreuses et se répandent dans le monde entier. On voit, entre autres, s’accélérer le numérique et avec lui l’utilisation des CD qui révolutionnent l’industrie de la musique, les téléphones portables et les caméscopes grand public. Les jeux vidéo se popularisent et deviennent, pour certains comme Super Mario Bros, une référence internationale de la culture populaire. La réception télévisuelle par satellite explose, et avec elle l’accessibilité aux images des conflits internationaux sur tous les écrans de TV. Désormais on ne peut ignorer les lots de morts, d’exodes, de massacres, de violences urbaines…
Parmi les catastrophes qui ont considérablement modifié le monde : le VIH qui s’est propagé partout, avec sa liste de morts anonymes et célèbres ; l’accident de Tchernobyl, en 1986, qui est le plus important accident nucléaire du XXe siècle.
Contrastant avec ces aspects sordides, on assiste enfin à l’issue de la guerre froide. La chute du mur de Berlin le 10 novembre 1989 fait figure d’un véritable symbole de la fin de cet affrontement débuté en 1947.
Sur le plan créatif et artistique, le métissage culturel s’affirme, et avec lui un droit à la reconnaissance internationale des pratiques artistiques des pays dits, à l’époque, du « Tiers-Monde ». C’est aussi l’arrivée de la révolution Punk et l’engouement pour le rock. Les institutions culturelles ouvrent un peu partout, de nombreux courants picturaux apparaissent et le marché de l’art est en plein effervescence. En 1989, le marchand d’art Eric Fabre écrit, dans le catalogue d’expo Nos années 80 (Fondation Cartier, Paris) : « On s’ennuyait ferme dans les galeries et j’ai pensé qu’un jour le Rock and Roll entrerait dans les galeries : c’est ce qui est arrivé avec la Figuration libre et les graffitistes américains de l’East Village ». En 1988, dans le catalogue de l’expo Les années 80, (CAC, Meymac), le critique d’art et collectionneur français Bernard Lamarche-Vadel écrit : « Ils [les artistes des 80’s] sont les enfants de la dictature de la communication… la « Figure libre » est bien le produit de peintres témoins de leurs temps dont ils ne font point d’autre usage que de l’illustrer ou pour certains en transférer les récits infantiles, qu’ils s’adressent indifféremment aux enfants et aux adultes ».
Combas, quelques notes d’intro
Robert Combas est né à Lyon, le 25 mai 1957. Aujourd’hui il a 64 ans.
Artiste multifacette dont la production opulente et la verve singulière ne passent pas inaperçues, Robert Combas est considéré comme l’un des artistes français contemporains les plus importants depuis des 80’s. Il est le seul artiste français à apparaître chaque année dans le classement Artprice des 500 artistes contemporains les plus cotés au monde.
Peintre, sculpteur, illustrateur, créateur d’objets et de mobilier, musicien, il est, avec Hervé Di Rosa, l’initiateur du mouvement artistique de la figuration libre, jaillissement libératoire d’une peinture qui s’émancipe des courants alors dominants : le minimalisme, l’art conceptuel et les nouvelles avant-gardes. On peut également considérer que Robert Combas a posé les jalons du street-art.
Petit topo sur la figuration libre
Cette nouvelle génération de peintres des 80’s est animée par un enthousiasme et une désinvolture contrastant avec la sévérité des années 1970. Les artistes de la figuration libre ne se réfugient dans aucune nostalgie. Sans honte ni culpabilité, ils s’inscrivent dans l’actualité de leur temps avec un style coloré, graphique et simplifié, inspiré de la BD, de la science-fiction, des dessins d’enfants et de la culture des banlieues. A l’instar des artistes américains, ils sont moins influencés par les graffitis. Leur peinture fait davantage référence aux arts populaires : monstres et robots pour Hervé Di Rosa ; art brut, imagerie arabe et africaine pour Combas ; contes, légendes et cirque pour Rémi Blanchard ; publicité et objets industriels pour François Boisrond.
Les règles de la figuration libre avec les mots de Combas
« C’est faire ce qu’on veut le plus possible, le plus personnellement, le plus librement. […] La Figuration libre, c’est se servir de toutes les recettes sans complexe pour améliorer son travail quand il est incorrect. […] La Figuration libre, c’est quand je fais une bande dessinée avec un héros rigolo et que le lendemain matin je laisse tout tomber pour faire une grande toile sur la bataille de Waterloo. Je ne suis pas Hergé, ni Andy Warhol, ni comme presque tous les grands peintres qui restent souvent prisonniers d’une forme de peinture, d’un ordre établi, qui ne changent que tous les six ans, ou certains même qui ne changent pas de toute leur vie. La vie, c’est de changer. On change de voiture, on change de femme, on change de chaussettes, on change de slip. Alors, on doit changer souvent de peinture, de dessin, d’idée. Un jour appliqué, le lendemain indiscipliné. Du bien fait, du mal fait, mais du soi-même. On peut prendre le café dans le jardin avec son voisin mais pas sa femme et tout son destin ».
Combas et la musique
Robert Combas est aussi musicien et grand collectionneur (il préfère le mot « accumulateur ») d’enregistrements musicaux. « Mon hobby ? collectionner des disques rock en vinyle de toutes les époques ! » (RC)
En 1978 il fonde, avec Ketty Brindel et Buddy Di Rosa, le groupe Les Démodés, un groupe aux sons primitifs et aux textes post-dada.
Depuis 2011 il forme, avec Lucas Mancione et Pierre Reixach, le groupe de rock Les Sans Pattes. « Les Sans Pattes, multi-instrumentistes du genre bricolo, jouent une musique éclectique : rock psychédélique, punk, électro, chanson italienne, un peu de Phil Spector et des Beach Boys, beaucoup de Suicide. » (Lucas Mancione) « Vu mon âge, c’était le dernier carat pour revenir à ce qui a animé mon adolescence. D’autant plus que je crois pouvoir dire que la musique m’a sauvé la vie. » (Robert Combas)
Musique et peinture convergent incessamment dans l’œuvre de Combas. Les références se nourrissent et/ou s’amalgament sans inhibition ni jugement. L’éclectisme libre d’une culture à la fois populaire et savante est la règle. Son œuvre est riche, intense, foisonnante et unique.
« Ma peinture, c’est du rock, la recherche du feeling. Le feeling, c’est le rythme. C’est le batteur fou dans la jungle et les danses vaudous. Ce sont les Rolling Stones copiant les vieux morceaux des Noirs, des bluesmen et qui, sans le vouloir, créent une musique nouvelle ». (RC)
Combas et le langage
En guerre depuis son enfance avec l’orthographe et la syntaxe, Combas est obsédé par le langage. Il joue avec les mots comme avec les notes, invente, triture, écrit.
Au début des 80’s, il décide d’accompagner chacune de ses peintures d’un texte qui joue à la fois le rôle de titre et de légende. Ces titres-légendes, sortes de sous-titres très imagés, décrivent le tableau sans être uniquement un commentaire littéral. Ils mettent en perspective la peinture à la manière des paroles d’une chanson, fourmillant d’argot, de patois sétois, d’images truculentes, de jeux de mots, d’expressions à rallonge. Le rythme est donné par une ponctuation vive et débridée. Je dois avouer que j’ai régulièrement hésité et m’y suis prise parfois à plusieurs reprise avant de vous les noter ici ! Certains titres-légendes ne sont pas à laisser à la lecture de tous… (certains tableaux non plus d’ailleurs !) Âme sensible s’abstenir !
« Quand j’étais aux Beaux-Arts, personne ne s’intéressait au titre. Cela n’existait tout simplement pas. C’était l’époque du groupe supports/surfaces, qui n’utilisait pas de titre. Donc, je me suis dit : je vais redorer le blason du titre, avec par exemple des choses courtes comme : « aujourd’hui j’ai rencontré Mickey et il m’a dit BATO ». Petit à petit, cela m’a amusé. Mais comme je commençais à vendre des tableaux, je n’étais pas très à l’aise avec tout cet argent, étant d’origine prolétaire. Donc, j’ai pensé au journal Pif et au gadget en plus pour expliquer mes œuvres. J’allais rédiger une histoire plus longue, humoristique. Je me suis dit : si parfois le résultat n’est pas terrible, de toute façon c’est en plus, c’est un titre, donc personne ne va en faire un plat ; et si c’est bien, ça ne peut pas faire de mal, bien au contraire. Ça m’a donné une discipline de l’écriture. Petit à petit, les titres sont devenus un travail en soi. » (RC)
« Je rédige les titres toujours après avoir fait les tableaux. C’est une sorte de petit poème par rapport à l’image et à la composition, mais en même temps j’y mets dedans des trucs personnels qu’on ne peut pas voir dans la peinture. […] C’est un texte vraiment libre. » (Robert Combas, extrait du catalogue Qu’es aco, Fondation Van Gogh, Arles, 2008)
Conclure cette intro !
Pour essayer de terminer cette intro qui n’en finit plus… 2 textes que je trouve magnifique à propos de Combas et son œuvre-univers.
Quelques mots de l’historienne de l’art, archiviste et conservatrice générale du Patrimoine français Ariane James-Sarazin, écrivant à l’occasion de l’expo Robert Combas. Geneviève dans tous ses états au Grand-Théâtre d’Angers en 2014 : « Sa peinture « fait du bruit » au propre – instruments et musiciens peuplent plus que d’autres figures ses toiles ; bulles, slogans, onomatopées scandent, rythment et déflagrent la surface peinte – comme au figuré : les couleurs claquent et saturent l’espace, la ligne ondoie et s’immisce comme une ritournelle entêtante, qui vous vrille l’oreille. Les parfums, les couleurs et les sons se répondent en une synesthésie ensorcelante et baudelairienne : on regarde un son, on entend une couleur, on hume Combas. Art total, plein d’une verve drue et d’une énergie vitale, essentielle, jouissive, où tous les sens sont convoqués et énervés jusqu’à l’orgasme. »
Et
Quelques mots du discuté philosophe et essayiste Michel Onfray, présentant Robert Combas lors d’une exposition à la médiathèque d’Argentan en 2011 : « Robert Combas est né à Lyon en 1957. Les encyclopédies et les histoires de l’art associent son nom à la « Figuration Libre ». Mais, au-delà de l’étiquette, on peut aussi le voir comme un baroque lyrique, autrement dit : un peintre compagnon de route et de fortune de Dionysos, le dieu des vignes, du vin, de l’ivresse, de la fermentation, de la danse, de la folie, de la transe, des substances vitales (sang, sperme, sève, lait), des animaux puissants (taureaux, boucs, béliers), de l’extase, de la végétation luxuriante, de la musique percussive, mais également l’inventeur de la tragédie et de la comédie, donc du verbe sculpter. Comme Dionysos, il chevauche le tigre et prend donc chaque jour le risque de se faire dévorer par son art. Sa peinture est l’une des plus dionysiaques de l’histoire de la discipline. »
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Greatest Hits : l’expo
Thierry Raspail, historien de l’art spécialiste d’art contemporain, directeur du Musée d’art contemporain de Lyon (de 1984 à 1991) et commissaire général de l’exposition, savait que pour Robert Combas l’art est rock et le rock est art.
Extrait de Burning Your House Down, écrit par Thierry Raspail à propos de Robert Combas et de l’exposition :
« […] Combas peint frénétiquement. Au sol, la plupart du temps, et tout le temps. Il vous parle courbé, en traçant, trempant, grattant quelquefois. Il trépigne, s’arrête, s’égare et revient, change de couleur et de côté, puis il chuchote son trait, et l’image monte. Dans l’urgence. Il s’arrache comme Cobain sur son manche. Never Mind The Bollocks. Rocket to Russia, qui des Ramones est mort ? Combas, la toile, il la caresse, et la couleur monte. I Don’t Live Today.
Faire péter les amplis, Foxy Lady, mais fluide sur la toile, sur le papier ou sur n’importe quoi : la couleur mêlée coule et se répand silencieusement quand tout autour le son sourd.
Fragile beauté : « Ma peinture c’est du rock ». Combas la joue sur six cordes et des fûts déglingués avec la tronche qui explose. Beauté courte : Born to Be Wild, puis La fille du Père Noël, le même riff que Hoochie Coochie Man. I Love You Tender.
Tragique beauté : « Peut-être ne laisserait-il qu’un amas infini de fragments aperçus, de douleurs brisées contre le Monde, d’années vécues dans une minute, de constructions inachevées et glacées, immenses labeurs pris dans un coup d’œil et morts. Mais toutes ces ruines ont une certaine rose ». L’ange maléfique rencontre l’académicien anar : Morrison et Valéry, et les deux poètes éructent ! To the Next Whisky Bar.
Et derrière ? Les amplis, le gros son. Devant : l’œuvre en live. Pas de repentir : accord de 7e, clope sur le si, break et riff. L’aube se lève, Syd t’es mort jeune, cramé aux portes du crépuscule.
Tout ça, c’est ce qui fait que Combas est Combas, rien d’autre ! Si ! Ajoutons l’Iguane, le Voodoo Chile et Broughton le lumpen british : Roundabout, carrousel !
Et l’art ? Combas l’affronte au corps à corps. La figure, il l’a bosselée, le portrait, il l’a chanté comme les batailles. Et puis, il y a le Dark Side de la Lune, le Chemin du Côté où le bitume fond et où les neurones s’enlisent : les monstres, les restes et les fantômes de la nuit. L’art est là, mais c’est depuis et avec le rock qu’il faut le voir. Mystery Dance et Dachau Blues.
Save the Last Dance for me Babe !
C’est pourquoi l’expo s’intitule Greatest Hits !
Mais il n’y a pas de scène sans backstage, pas de rock sans rumeur et pas de son sans studio ; car c’est là où on bricole les pistes : Shut Up and Play Yer Guitar ; car c’est là où on bidouille les fragrances et où on bizute les larsens, et alors : The Wind Cries Mary ; et alors Nino, l’anthropologue triste, peut vendre ses robes. C’est là aussi où on crée les mythes et où on fabrique les oublis. Mais c’est surtout là où on bosse, avec la pâte, la matière live à l’échelle, à l’estomac et dans les affres de la perfection. C’est pourquoi j’ai proposé à Robert d’abandonner son antre d’Ivry pour installer deux mois son atelier, peinture et son, au musée. Sans playback. […] »
Pour écouter la playlist de Thierry Raspail « Combas Rock », c’est ici !
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Robert Combas répond :
« Redescendre les marches du temps. Vous en connaissez vous des directeurs, ou qui s’appellent quelque chose finissant en « eur » (sic Thierry Raspail), qui pondent (pas en poule en jeune coq) un texte comme un adolescent sur le rock et en plus pour ma pomme ! Merci je suis zému. Non, ça ne se dit pas avec des mots ça se ressent ce genre de remerciements.
Bon la rétrospective Greatest Hits on commence par le début on fi nit par la fin, c’est énorme !
Richard Leydier est le Commissaire. Geneviève est de partout. Mes assistants(antes) m’ont laissé tomber au dernier moment. Je les remercie… Il paraît que je stresse tout le monde… Sauf Oldi, le mort vivant et fidèle Buster Keaton, qui fait ce qu’il fait point. Mais au moins, il le fait, Harald est à la photo.
On est à la bourre ! Heureusement qu’à Lyon, ce sont des vrais pros, tout le monde s’est réveillé, on va y arriver. Bref à part la tension qui me mine, tout va pour le mieux. »
Cette exposition Greatest Hits présente plus de 600 œuvres de Combas, réalisées depuis les 70’s jusqu’à 2012. Première grande rétrospective, elle se développe dans tout le macLYON suivant une trame « chronologico-thématique », pour reprendre les termes du critique d’art et commissaire invité de l’exposition : Richard Leydier. « L’exposition permettra ainsi d’apprécier la synthèse qu’il opère entre diversité (des supports, des techniques, des formats, des thèmes) et cohérence de la démarche en expérimentation constante. » (Richard Leydier)
Pendant 2 mois, la présence de Robert Combas est quotidienne. Cette exposition « Rock on the wide size/wild side » grimpe et grouille sur 3000 m2, soit 3 niveaux.
« Envahir l’espace, c’était une obligation. Et encore, l’invasion est réduite par rapport à ce qui était prévu. J’ai craint que les toiles soient absorbées par le nombre, donc on a épuré un peu… Bon, d’accord, de toute façon, ça ne pouvait pas être une exposition normale. Ce n’est pas une exposition à voir en une heure. On peut, bien sûr, mais je pense qu’il faut du temps pour bien la regarder. Ce n’est pas une peinture de consommation rapide. » (RC)
Richard Leydier, utilise le terme « rétrospectlive », cette exposition chronologique et thématique n’est pas statique :
- au 2d niveau un studio de peinture et son est aménagé : Combas crée en direct chansons et tableaux, et reçoit comme chez lui amis, galeristes et journalistes. Le public découvre le backstage !
Décrit comme cela, le 2d niveau paraît extraordinaire. Dans les faits la méfiance de Combas envers les médias semble vite reprendre le dessus. Il ne se montre pas si loquace. « Vous m’emmerdez ! Si vous aimez ma peinture, c’est tout ce qui compte… Moi, foutez-moi la paix, j’ai rien à dire ! Et arrêtez de me prendre en photo ! » […] « Je suis souvent déçu par les articles sur moi. Même chose avec les photos : l’autre fois, il y a un mec qui a fait des super photos et dans son article, il a mis des photos de merde qu’il a retouchées, en plus ! » (R)
- au 3ème niveau tout est musique : une scène de concerts du groupe Les Sans Pattes, où tournent les vidéos du groupe quand le groupe ne répète pas. Dans ces vidéos tournées devant quelques-unes des œuvres dans les salles, Robert Combas, habillé de vêtements très bariolés, joue, parle, psalmodie, mime, danse et conte des fables. Avec lui Lucas Mancione, son guitariste, et 2 danseuses masquées. Et, parmi les pochettes de vinyles de cet « accumulateur » enragé, les œuvres liées à sa passion musicale.
« Il faut toutefois bien saisir que la musique ne constitue pas une activité annexe : elle fonde véritablement le rapport à la peinture, et ce dès le début des années 1980. […] La musique et les films conçus ces derniers mois dans l’atelier jouent en quelque sorte la bande- son de près de quarante ans de peinture. Confrontés aux récents films, des tableaux de toutes les époques permettront de croiser des personnages incontournables de l’histoire du rock et d’autres hauts en couleurs, du Velvet Underground à Georges Brassens, en passant par les fanfares et autres joueurs de congas Sud – Américains, montrant là encore, dans le domaine musical cette fois-ci, toute la diversité qui fonde l’œuvre de Robert Combas » (Richard Leydier)
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Vous l’avez compris, Robert Combas, cet artiste français vivant des plus importants, est hyper productif, toujours en mouvement et félibre, avec un flux de paroles attachantes dans lequel se chevauchent de multiples anecdotes dans d’incessants allers-retours. Artiste dans différents domaines, dont la musique, il développe son univers Rock’n roll et fait évoluer son art sur tous les supports qui passent entre ses mains, de la toile au mobilier.
Partant du principe que tout a déjà été fait, Combas s’approprie les grands poncifs de l’art et ouvre de nouvelles possibilités pour un retour à la figuration. Il s’attache à redéfinir l’utilisation de l’espace, de la couleur et de la figuration. Son esthétique est assez brute et influencée par tout ce qui occupe sa vie de jeune adulte, principalement la TV, le rock, la BD, le sexe, mais aussi Sète. Selon certains experts, son art est qualifié de punk : couleurs criardes, divers individus au style communicant et grimaçant. En d’autres termes, il « laisse la peinture vivre » en la laissant faire son propre chemin dans ses œuvres.
Allez ! suivez-moi ! Commençons la (re)visite, ou plutôt l’expérience sensorielle, et parcourons ensemble ces 6000m2 d’explosions colorées et graphiques, au son des playlist spécialement composées par Combas pour chaque salle. Les morceaux choisis alternent avec tout ce qu’il aime en musique, du XVIe au XXe siècle !
« Je voudrais avertir : pour vraiment la voir il faudrait 2 ou 3 jours. » (RC)
J’avoue j’ai peur de vous perdre en chemin ! Ce post est (trop) long… mais vaut vraiment le coup de prendre le temps !
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1er niveau
On commence par le début
Combas est né en mai 1957, à Lyon « par accident », se plait-il à dire. En 1961 il suit ses parents à Sète dans l’Hérault et y grandit. Le sud est très important pour lui : il est un endroit où « même les drames ne sont pas du Zola car il y a le ciel. »
Fils d’un père ouvrier et d’une mère agent d’entretien, sans argent et communistes militants, Combas passe son enfance et son adolescence dans un milieu populaire, au sein d’une famille nombreuse (dont son cadet Marc, qui est également peintre et dessinateur officiel de la ville de Sète, sous le pseudonyme de Topolino). Ses parents se battent pour la culture, particulièrement son père. Robert Combas confie à Catherine Ceylac, lors de son émission Thé ou Café du 8 janvier 2017, avoir eu sa 1ère émotion artistique vers l’âge de 4/5 ans. Trouvant difficilement sa place dans le système scolaire, il s’évade et s’exprime très tôt par le dessin. « Je dessinais tout le temps, comme d’instinct, automatiquement. Je n’arrêtais pas de dessiner et vers 6-7 ans, mes parents ont dit que ce serait bien que j’aille aux Beaux-Arts et alors ils m’ont emmené aux Beaux-Arts… et c’est comme ça que je suis resté aux Beaux-Arts de l’âge de 7-8 ans jusqu’à 23 ans. » Ses parents l’inscrivent à l’école des Beaux-Arts de Sète. Il y apprend la peinture, mais c’est avec le dessin au stylo à bille, qu’il pratique avec ferveur et canalise son énergie créatrice. A 17 ans il arrête l’école. Il découvre le rock pendant son adolescence et remplie alors ses cahiers de musiciens.
Après avoir étudié aux Beaux-Arts de Sète pendant 1 an avec Éliane Beaupuy-Manciet, il étudie, de 1975 à 1979, à l’École Supérieure des Beaux-Arts de Montpellier.
Dès 1977 Combas peint des séries de batailles, sujet complet et intemporel. Ses tableaux sont d’une facture expressionniste très colorée et ses personnages cernés de noir. Ce cerne noir, qui plus tard fait le « style Combas », peut être lié au fait que Combas ait choisit de préparer le diplôme de gravure et de peinture. A cette même période, il réalise également de nombreux collages et gravures. Le travail de gravure est déterminant pour lui mais toute la technique lui pèse. En synthétisant ses différents styles sur les plaques apparaissent les prémices de ce qui s’appellera quelques années plus tard : « Figuration libre ».
Combas passe son diplôme des Beaux-Arts en 1979 à Saint-Étienne. Parmi les membres du jury, Bernard Ceysson, acteur important de l’art contemporain depuis la fin des années 1960. En 1980, il lui propose de participer à l’exposition Après le classicisme qui a lieu au musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne.
À cette période, l’art conceptuel domine la production artistique française. Combas prend le contre-pied de ce courant en apportant, dès son entrée aux Beaux-Arts, une esthétique novatrice. Pendant la période de 1977 à 1983 les supports utilisés par Combas sont multiples : cartons, bois, tissus, draps et plus rarement de la toile. Il compile dans plusieurs carnets des motifs qui se retrouvent plus tard dans ses peintures.
Combas poursuit avec, entre autres, ses appropriations de la figure de Mickey Mouse de Walt Disney. Il acte l’appropriation d’une image devenue universelle et transformable à loisir, comme le font les artistes américains Andy Warhol et Roy Lichtenstein. Dès lors les textes écrits par Combas en légende de ses œuvres préfigurent son travail d’écriture qui prendra de plus en plus d’ampleur par la suite. « En 1977, j’étais au contact des milieux jeunes, rock et branchés où il y avait une certaine création. C’était l’époque un peu punk, beaucoup de jeunes étaient partis vers la bande dessinée. Il ne restait aux Beaux-Arts que quelques anciens babas dépassés et plus ou moins influencés par supports/surfaces ou par leurs profs. J’avais choisi la peinture et vers la fin de la première année, je me suis dit qu’il fallait que je fasse quelque chose de nouveau. J’ai toujours voulu faire quelque chose de complètement nouveau, j’ai toujours eu le besoin de me démarquer par rapport aux autres. »
Titre-légende : « Pour leur anniversaire MICKEY et TINTIN se sont rencontrés au sommet. TINTIN portait un pantalon de golf et MICKEY avait mis son fameux slip à fleur fleuri. »
Titre-légende : « Mickey n’est plus la propriété de WALT, il appartient à tout le monde BATO ! »
En 1978, Combas a 21 ans. Cette année 78 est marquée par 2 co-créations importantes : la revue BATO, revue « assemblagiste et faite à la main » invitant d’autres artistes à s’exprimer librement, qu’il crée avec Hervé Di Rosa et Ketty Brindel (compagne de Combas à l’époque) ; et la création du groupe de rock punk et spectaculaire Les Démodés avec Ketty Brindel et Richard Di Rosa, dit Buddy (frère de Hervé Di Rosa). La première publication de BATO et la création du groupe musical Les Démodés marquent le jalon de la figuration libre, mouvement dont Robert Combas fait, en Europe, figure de chef de file.
En 1981 le critique d’art et collectionneur français Bernard Lamarche-Vadel leur propose de participer à l’exposition Finir en beauté. Cette expo qui se tient dans son loft parisien qu’il doit quitter. C’est cette expo constitue le véritable point de départ de la figuration libre.
Au cours de l’été 1981 Benjamin Vautier, très impliqué dans la scène contemporaine et plus connu sous le nom de Ben, invite Combas et Di Rosa à exposer dans sa galerie niçoise. C’est à l’occasion de cette expo 2 Sétois à Nice que Ben trouve l’expression « figuration libre ». Sur le site web de Ben Vautier on peut lire :
- 1981 « Je crée le terme Figuration Libre. En Italie on parle de la Trans-avanguardia, en Allemagne on parle de Violent Painting, en Amérique de Bad Painting, il manque un mouvement pour la France. Templon propose les « Nouveaux Français ». Mais je préfère : Figuration Libre car je pense que ce retour à la figuration contient avant tout une revendication de liberté. Je propose à Marc Sanchez, qui s’occupe de la Galerie d’Art Contemporain à Nice de réaliser avec moi une des premières expositions de Figuration Libre en France. Ce sera L’Air du Temps, qui eut lieu en 1982, en été. »
- 1982 : « Libre de quoi ? / Libre de faire laid/ Libre de faire sale/ Libre de préférer les graffiti du métro de New York aux tableaux du Guggenheim/ Libre d’avoir une indigestion de Support s-Surfaces/ Libre d’avoir envie de refaire du Matisse, du Picasso, du Bonnard/ Libre d’aimer Mickey, la bande dessinée et pas Lacan/ Libre de peindre sur n’importe quoi. »
Pour Combas : « La figuration libre correspondait à 2 choses : la première consistait à faire un pont entre l’art, l’art contemporain, et les gens qui le regardent. La seconde était qu’après Duchamp et Buren, il n’y avait a priori plus rien à faire. Dans un tel contexte, la seule chose à faire justement était de s’amuser et d’essayer de peindre quelque chose… C’était aussi simple que ça. »
Pop Art arabe
Entre 1978 et 1980, Combas « monte à la capitale » et il s’y installe définitivement en 1980.
Lors de ses premiers repérages il y découvre les enseignes des commerçants africains, magrébins et juifs du quartier de Barbès. Ces enseignes et les scènes naïves peintes que les panneaux lui inspirent ce qu’il appelle le « Pop Art arabe ». « Moi, c’est un peu comme ça la peinture, avoir le rythme (feeling) des écritures et des peintures publicitaires chinoises, arabes, méditerranéennes. »
Les principaux points communs avec le Pop Art américain sont : les couleurs franches et vives, la fluorescence et la représentation d’objets emblématiques de la consommation. Dans ses œuvres aux airs de publicité des pays émergents, apparaissent alors de fausses écritures inspirées à la fois de l’alphabet arabe, du cunéiforme ou d’idéogrammes asiatiques. L’influence de la BD est également présente avec la segmentation de ses tableaux ou dessins en plusieurs cases.
Titre-légende : « La femme aux piments qui rougeoiera des cuisses si elle mangera trop de cuillères d’harissa (+ 3 salamandres). Les trois salamandres dansent le sirtakiss. »
Titre-légende : « Banania fait de la publicité pour les bonnes bananes poilues avec son cheval Rintintin qui a des poils plein les mains (normal il est du sud). »
Titre-légende : « Tokyo Joe se ballade à Hong-Kong. Il rencontre Zina la jaune tigresse, espionne et pute à la fois. Avec elle il fait des affaires hétéroclitoridiennes : Microfilm, Documents secrets, plans d’avion, photos pornos, massages THAI. Quand il vient là-bas il descend à l’hôtel Nikeur. Un hôtel gratte-ciel. Il prend ses rendez-vous et magouille à tout ROMPRE. Un jour ça ira mal comme le jour où il s’est fait choper par des maffiosi du coin et qu’ils lui ont aspergé la tête avec de l’acide citrique, depuis il ressemble plus à rien de tête. Il ressemble à Vincent PRICE, dans L’Homme au masque de cire. Heureusement il se cache le crâne dessous un chapeau et les joues grâce au col de son TRENCH-COAT. ZINA ELLE, n’a pas très peur, de toute façon y’a trop de fric à la clé. »
Ces peintures de Robert Combas sont parmi celles que j’aime le plus et dans lesquelles je puise mon inspiration pour ma pratique personnelle. Le découpage du format en plusieurs vignettes, du contraste entre des dessins bien léchés, du plus flou, et du texte. Le tout composé comme pour être imprimé dans un album.
Les années chaudes 1982-1988
Durant la période intense et explosive de 1982 – 1988, la carrière de Combas décolle, à la fois portée par la fraicheur qu’apporte sa peinture et un climat mondial favorable à la nouveauté picturale. En même temps que la Figuration libre, les nouveaux Fauves allemands, la trans-avant-garde italienne et les graffitistes américains, tels que Keith Haring et Jean-Michel Basquiat, s’imposent.
En 1982 Combas débute une longue collaboration avec le galeriste parisien Yvon Lambert. En 1983 il expose à New York pour la première fois, chez le galeriste du Pop Art américain Leo Castelli. Puis en 1984 le centre d’Art de l’Arca, à Marseille, lui consacre sa première grande exposition personnelle, et avec, son premier catalogue monographique. Les rétrospectives s’enchainent, notamment celle de 1987 au CAPC de Bordeaux. Cette rétrospective est ensuite reprise à Amsterdam par le Stedelijk Museum.
Pendant ces années 1982 – 1988, la peinture de Combas prend une toute autre ampleur et le « style Combas » s’affine. Les formats deviennent monumentaux et sa méthode se libère : son travail peut tout autant partir d’un sujet précis que de rien. Lorsqu’il a une idée initiale, celle-ci peut évoluer radicalement en cours de route. Il commence par disposer des tâches de couleurs et, lorsque la scène lui parait à peu près posée, il cerne de noir ses tâches de couleurs.
Apparaissent alors, comme par magie, des figures. Dans les espaces restants, toute une pléiade de créatures minuscules vient terminer le remplissage. Mais comme il n’y a pas de règle, le tableau peut également commencer par les cernes noirs…
Titre-légende : « Fannie contemple avec amour son petit fleur surnommé Pierro. Dans cinq minutes, elle aura « le diable au corps » : elle prendra son fleur, elle se le mettra où je pense. Et elle se caressera le corps aussi. »
A partir de 1981 – 1982, Combas ajoute à ses œuvres un titre-légende. Il s’agit de textes plus ou moins longs, parfois de véritables historiettes, inspirés par le tableau. En comparant les œuvres à leur titre-légende on s’aperçoit que l’image et l’écrit s’attisent pour renforcer le tableau. Les textes révèlent le talent poétique de Combas, sa langue singulière mêlée d’argot sétois et jeux de mots élaborés, ses mots tour à tour attendris, révoltés, sexuels, mais toujours empreints d’humour. « Il y a plusieurs raisons à ces histoires de titres. J’ai par exemple toujours été complexé par la montée des prix. […] Donc, c’était une espèce de plus. En plus de la toile, je donne un titre. Seulement, je ne donnais pas qu’un titre, je donnais une histoire ; une création en plus. ».
Titre-Légende : « Gaby le Docker bouffe un sandwich. Jennifer la noire aux yeux d’œuf et au jus de tomate porte un chapeau de salade sur la tête, sa tête en noix de coco. Hermann l’Allemand se prend pour un cow-boy avec ses pistolets banane. PS : Signalons que Jennifer se fait aspirer le cul par Monsieur Bite expert en expertise. »
Dès 1982 la signature, basiquement outil d’authentification, participe pleinement à la composition du tableau ou de l’intrigue de la peinture de Combas. Elle peut avoir le même statut qu’un personnage, ou même être sujet à part entière de ses peintures ou de ses sculptures.
Titre-légende : « Signature autoportrait avec phonétique et lettres semi-Arabo écétéra. Le temps se radoucit, bientôt le printemps. Les fleurs éclosent, elles vont bientôt se faire niquer par les abeilles. Le soleil rit comme un chinois. »
Les sujets traités par Combas entre 1982 et 1988, et particulièrement entre 1984 et 1988, sont parmi les plus fous, les plus délirants. Un grand nombre de ses tableaux montrent une composition très fouillée. A cette période, Combas semble retarder le plus possible la décision de stopper le travail pictural, faisant ainsi de chaque œuvre un numéro d’équilibriste.
Il peint des « galeries » de portraits de personnages excessifs et hauts en couleur, un bestiaire d’animaux aux émotions et aux comportement humains, des grandes batailles et des scènes de genre à caractère sexuel, festif, gastronomique.
Titre-légende : « Hé blanche neige un ricard et en vitesse ! Dites les sœurs à bamboule, vous me les apportez ces deux demi ? Garçon Hips, s’il Hips vous Hips plait. Un café express banania de mes fesses. Les clients i peuvent igoler, apoué il faudoa paoué l’addition 18,90F, ou alors une bonne dizaine de coups de lance dans la tête. »
Titre-légende : « Il faut quand même remarquer qu’il porte une chemise où il y a une femme (sa maitresse) à poil, des ibrougnes (ivrognes) dans un bar et sa femme à la cuisine. Toute son histoire de maison quoi (ille !). »
Titre-légende : « Le maçon ouvrier porte une idole Bamboula avec grosses chaussures Bata (marque). Le conducteur halluciné du camion en briques. Le Professeur Regardeur agrégé en langue fourrée. Le Motard Fan d’Alain Prost (champion automobile) qui baisse son falsar pour montrer quelque chose à une belle blonde. Les n°1 et n°2 de la connerie : le solitaire et la femelle naine amazone tueuse de gens. Tout ça, entouré de monstres blanchâtres qui se prennent pour des Chaméléons carnivores. »
Titre-légende : « YELLOW SUNSHINE, L’ARBRE A TRIP, c’est la vision d’une chaleur sans sueur, sèche et remplie de petits trucs, bidules et modules. Dans le ciel, des personnages déformés rigolent aux éclats, apparaissent et disparaissent. Quand vous passez devant l’arbre à trip, c’est votre tête qui explose en mille joies et couleurs. Du saule pleureur au géranium DAHLIA, toutes les formes s’enchevêtrent quand vous fixez l’ARBRE A TRIP. »
Le Sud
Le sud de la France, et tout particulièrement Sète, est une source d’inspiration très importante pour Combas. Les paysages sont rarement ses sujets d’inspiration, mais ceux de Sète font exception.
L’ambiance nocturne de la vie sétoise le nourrit. On la retrouve dans certains de ses tableaux tel que Le marin débarqué (1984) dont, une fois de plus, le titre-légende n’est pas piquer des vers.
Titre-Légende : « Le marin débarqué (jusqu’à 6 heures du matin et on repart, ordre du capitaine « Couillandré »), marin français du bateau « La Marie Salope », il vient de débarquer. Il est très excité car il va se laver et après il ira troncher. Car lui, c’est pas : « QUERELLE ». Il a les couilles pleines. Et quand Monsieur les couilles pleines, il va voir les putes, les femmes de marin, celles qui font oublier les ennuis de la vie, celles qui remplacent la mère, la femme, la sœur, et qui font le petit train en plus. »
Sète c’est aussi sa famille avec, entre autres, son oncle ivrogne et sa grand-mère adulée.
Titre-légende : « Mamie tuait le lapin et moi je ne voyais rien. Dans la lune sans fin, je comprenais pas bien, nœud faisait pas la liaison avec les autres Bunnys dont les clapiers fermés reposaient à quelques mètres d’ici. Là-bas, près du poulailler, Mamie voulait m’habituer, me passer inconscient le flambeau de ce sacrifice non rituel. Et moi assis jambes croisées, je regardais la scène sans broncher et de temps en temps aussi les feuilles et le ciel. Je n’étais ni content, ni dégouté par ce tuage organisé qui, par plusieurs phases passait. Ce n’est que bien plus tard que la violence sauvage dévoilera son visage découvert pour tatouer au plus profond du dedans de mon moi ce court-métrage. »
Dans les années 2000, la plupart des peintures récentes de Combas ont été réalisées à Sète où il se ressource, se pose, travaille et prend le temps de vivre aux côtés de son épouse Geneviève. « À la soixantaine, tu es au pied du vieillissement. Physiquement, je ne pouvais plus continuer sur les mêmes délires et le côté hyper speed, marginal. Je le suis toujours un petit peu, mais les modes changent, le monde est en pleine mutation, ça t’amène à réfléchir autrement. »
Couples
Les muses reconnues du grand public sont plutôt rares. De même que Gala a inspiré Dali, Dora Maar a mis les pinceaux de Picasso sens dessus dessous, la vie de Combas est colorée par ses histoires d’amour. Parmi elles, Ketty Brindel avec qui, vous avez pu lire plus haut, il a créé le groupe de rock Les Démodés en 1978.
Titre-légende : « Catherine Ketty c’est la reine de cœur, un gentil coquelicot (à épines ?). »
En juin 1987 Combas rencontre Geneviève Boteilla à Paris.
Cette jeune danseuse bouleverse la vie et l’œuvre de Combas, dont la peinture devient un immense journal intime dans lequel, pour reprendre les mots d’Ariane James-Sarazin : « l’amour s’affiche, se dit, se crie se susurre, se rêve, se vit, se pâme, combat ». Quelques mois après leur rencontre, Geneviève s’installe en résidence au Centre National de Danse Contemporaine d’Angers, la ville qui abrite donc les premiers pas de ce nouvel amour explosif. En 2014, c’est tout naturellement que l’expo Geneviève de toutes les Couleurs se tient au Grand Théâtre d’Angers.
Patiente et attentive, Geneviève se retrouve dans de nombreux tableaux de Combas : des portraits, des scènes d’amour, des scènes du quotidien, des scènes de genre, des scènes fantasmées… dans lesquelles elle incarne aussi bien la muse que l’amoureuse, la guerrière, la danseuse, l’animal, le rêve, le cauchemar. Geneviève est à la fois muse-modèle et muse-esprit, véritable souffle, énergie, inspiration, hallucination et ivresse.
Titre-légende : « Le couple enlacé rose bonbon sucé savoure le plaisir. Avant de dessaisir l’occasion de finir leur vie au paradis. Et c’est vrai que c’est elle qui n’a pas pu s’empêcher, La belle, de se faire TENTER auprès du sieur SATAN. »
Femmes
Dans la peinture de Combas on croise souvent des femmes lascives, allongées. Même si parmi elles se trouvent quelques modèles occasionnels et imaginées, il s’agit surtout de Ketty Brindel, Maïté et Sophie, 2 des autres femmes ayant partagé sa vie et, bien évidemment, Geneviève Boteilla.
Titre-légende : « D’après les deux étoiles d’Henri Matisse qui sont au musée, j’ai fait une toile. Mais comme y’a une black and white qui m’a tapé dans la nuque, la fille arabe de Matisse paraît être née en Nouvelle Guinée et les familles légères et colorées du grand collage sur fond blanc, sont devenues nerveuses et elles m’entraînent dans une espèce de tourbillon qui me partage en plusieurs types et me fait rougir. Est-ce que j’arriverai jusqu’à votre lit et est-ce que je toucherai le gros lot ? Il faut se glisser dans les draps (ou dessous) lui baisser le pyjama et lui caresser la fourrure minimale qui se trouve entre ses jambes. Et après, suivant l’envie, lui rentrer ma sonde personnelle dans la fente. Au bout d’un moment ça fait tilt ! Si Henri existait, il serait excité. »
Pour bien saisir le lien avec Henri Matisse, voici ci-dessous, une des Odalisques peintes par Henri Matisse de 1921 à 1928, inspirées par ses voyages au Maghreb. Henriette Darricarrère est le modèle privilégié par Matisse pour cette série de tableaux.
Les rapports qui se jouent entre « regarder » et « être regardé », qui s’établissent entre Combas et ses modèles, sont des rapports constants dans l’histoire de l’art. Dans la dimension érotique des corps offerts figurés dans les œuvres de Combas, on perçoit le plaisir qu’il éprouve à les caresser de son pinceau.
En arrière-plan le Portrait de Geneviève ma fiancée en princesse sur sud, 1987, acrylique sur toile – 195x230cm.
À la vue de plusieurs des œuvres de Combas, on peut constater que, d’un tableau à un autre, les femmes rêveuses et allongées sur le ventre adoptent une position identique.
Lautrec, les coulures
Dans le panthéon artistique de Robert Combas, figure en bonne place Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901). Pendant le printemps 1990, Combas installe son atelier au musée Toulouse-Lautrec d’Albi en vue d’une exposition durant l’été ce cette même année.
Tout chez l’aristocrate déchu d’Albi suscite l’intérêt de Combas : son goût pour le graphisme et l’affiche, faisant de lui une sorte de précurseur du Pop Art, son existence faite d’excès arrosés d’absinthe et passée entre les cafés de Montmartre et les maisons closes, ses sujets empruntés au monde du théâtre et du spectacle, sa passion pour les femmes, dont la plupart étaient ses maîtresses, qu’il saisissait dans une intimité charnelle.
Les tableaux peints par Combas à cette occasion évoquent, avec une grande liberté des évènements et des protagonistes, la vie de Toulouse-Lautrec.
Geneviève prend souvent la pose et joue, encore une fois, le rôle de modèle pour revêtir les habits de La Goulue, entre autres muses de Lautrec.
L’année précédant cette exposition Combas visite de nombreuses églises et son intérêt pour l’art religieux grandit, notamment pour les icônes, et il reconsidère alors le moyen format pour ses tableaux. Sur ses peintures apparaissent de fausses coulures, sorte de rideau coloré, masquant partiellement l’image. Un cadre peint en trompe l’œil habille la figure, cadre parfois même peint à l’intérieur de la toile, en évocation à l’art du vitrail. L’utilisation qu’il fait de la peinture or annonce ses expériences des 90’s, de même que les fausses coulures annoncent les recherches des années 2000 sur la troisième dimension, les jeux de superpositions et de surimpressions photographiques.
Titre-légende : « Geneviève en icône assise sur le sable. La femme divine et son rayonnement, tel un ostentatoire d’église. Impression religieuse malgré l’érotique. Coulure de la foi et de l’esprit. Multitude d’éléphants mystiques à la « queue leu leu ». Clin d’œil à « Henri de » et sont éléphant signature. Clin d’œil à Toulouse-Lautrec et ses femmes faciles et vraies mais pourtant divines. »
Titre-légende : « Portrait qui pourrait être d’une période bleue, mais qui n’en est pas une (de période). Espagnolisant dans le port du cou volontairement disproportionné le reste est à l’avenant, comme un faux classique, comme du baroque flamenco : la barraca Flamenca. Un ! la barraca flamenca ! »
Titre-légende : « Les jambes féminines, les jambes divines, celles que n’a pas eues Toulouse, c’est MOLINIER qui les a gagnées. Les jambes magnifiques augmentées d’escarpins posent telles un vitrail magique au milieu d’une ogive gothique. Le soleil et la lune lui font un accompagnement influençant sûrement. Des coulures de lumière inventent un rideau de couleurs et de chaque côté un garde aussi encouluré monte la garde bouche ouverte et énormes dents serrées. Jambes érotiques mystiques plus belles que jamais TOULOUSE AURAIT AIMÉ POSSÉDER. Certains parlent de tendre les bras, lui il vous tend les jambes. »
Réinterprétations, reprises
Dans la pratique de Combas, et ce dès le début de sa carrière, la réinterprétation et le remake sont à la peinture ce que la reprise est à la musique. Parmi ses modes opératoires essentiels : s’appuyer sur une œuvre préexistante, qu’il s’agisse de peinture, de photo, de texte ou encore de musique. Vous avez pu voir un peu plus haut la peinture HOMMAGE À MATISSE ET MAÏTÉ, en dessous de laquelle je vous ai posté une des peintures de Henri Matisse qui a inspiré Combas ( (dans cet exemple une odalisques).
Il explore entre autres les œuvres de Jacques Louis David, Nicolas Poussin, Diego Vélasquez, Ruben, Francis Bacon, Paolo Uccello, Pablo Picasso…
Sa réinvention est, contrairement à celles de Warhol par exemple, dans le respect à l’égard de ses modèles. En ce sens on peut considérer que ses œuvres sont plutôt de l’ordre de l’hommage. Il y met sa patte, certes, mais avec une certaine humilité et dans un souci de prolongement de l’histoire.
Titre-légende : « Black Gabrielle d’Estrée palpe les bouts de nichon de sa sœur Joséphine qui ne bronche pas étant frigide. Une armée de Louidjis triangulaires regardent la scène en bavant comme des obsédés du sexe faible. Hier soir elle s’est fait niquer par un totem primitif représentant une déesse particulièrement lesbienne. Depuis cette histoire elle vote pour le Mouvement de libération des femmes à clitoris à fermeture éclair. »
Titre-légende : « Georges est en train de tuer le dragon kidnappeur de la belle princesse prisonnière à cheval sur son cucul. Le château du Roi, son père, n’est pas loin, mais personne n’a osé sortir le groin sauf le museau de Saint Georges. Il reviendra Saint à cause de cet exploit, ce qui ne l’empêche pas de ne pas épouser la fille du Roi et de finir martyrisé comme tous les saints dignes de foi. »
Titre-légende : « Bé ! La caisse ? Bé la caisse ? Vé la caisse ! Belle la caisse Bélasquèss ! Bélasquez ! Vélasquez ! Se dit d’une belle charpente humaine, d’une belle de dos avec des formes aérodynamiques souvent sophistiquée grâce aux habits, shoes et accessoires. Donc, Cardinal de Vélasquez via Ba con par Com bas (Ba-con Com-bas amusant non ?). »
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2ème niveau
Batailles
Sous forme de petites BD, de reproductions des livres d’histoire, de récits mythologiques, inspiré constamment par l’actualité contemporaine où la guerre est omniprésente, Combas a toujours dessiné ou peint des batailles. Avec elles son style et sa pratique picturale évolue très vite. « Ce qui compte dans cette peinture, ce n’est pas que cette peinture soit organisée, c’est son envahissement même. » (Vincent Bioulès, Ateliers 81/82, Suzanne Pagé, catalogue d’exposition, Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, 1981)
Titre-légende : « Commando américain en pleine mission en Birmanie se faisant attaquer par les soldats japonais, fidèles sujets de l’empereur. Les deux camps étant sérieusement gonflés à bloc, ça va finir par un ex-aequo (avec morts sur le terrain en succion squelettique). »
Bien que l’essentiel des batailles de Combas datent des 80’s, ce thème est privilégié dans son œuvre. Il aborde tout type de conflit : les cow-boys et les Indiens, les grandes batailles de l’Antiquité avec entre autres la guerre de Troie, conflit légendaire de la mythologie grecque, la bataille de Waterloo en 1815, les guerres mondiales de 14-18 et 39-45, la guerre Iran-Irak (première guerre du Golfe) de 1980 à 1988, la seconde guerre du Golfe démarrée en 2003, les bagarres de rue…
Sur le plan symbolique, la bataille est pour Combas une métaphore de la vie qu’il envisage comme une lutte de tous les jours. C’est aussi un thème très complet qui lui permet de répondre très vite à son imagination proliférante et à ses impulsions délirantes d’une verve graphique et colorée sans égal. « Rien qu’avec le thème des batailles, j’aurais pu faire une carrière, puisque dans les batailles, il y a un côté poétique, historique, mais aussi contemporain ou d’actualité, enfantin, pop, abstrait et même expressionniste, symbolique aussi… » (Robert Combas, Le fan, entretien avec J. Palette, Ed. La Différence, Gal. Beaubourg, Paris, 1989)
Peindre une bataille est un risque : format monumentale, nombreux protagonistes, multitude des actions, mouvements contraires… Difficile d’équilibrer et de rendre lisible une telle composition. La bataille de Waterl’eau (1982) acrylique sur toile de 4×7 m, et La Guerre de Troie (1988) acrylique sur toile de 2,4×8,96 m, sont les 2 plus grands formats peints par Combas.
Voici 2 détails de Waterl’eau et son titre-légende… que j’aurais surement mieux retenu que les dates de mes cours d’histoire !
Titre-légende : « C’est le jour où Napoléon se l’est fait mettre gros comme une maison. Je me rappelle que les soldats anglais qui ont d’ailleurs gagné avaient les mêmes habits rayés que les soldats anglais des bandes dessinées de Bleck le Rock. Les grenadiers français, eux, étaient en bleu avec leurs fameux casques en fourrure. À cette époque-là, les batailles étaient comme un mélange de match de foot et de jeu de dames. Les chefs faisaient avancer les soldats comme des pions, chacun avec sa couleur. Souvent les batailles duraient une semaine souvent plus. C’est pour ça qu’on recommandait aux soldats d’apporter un rechange au cas où ils se saliraient le cul. »
Le sexe sans dessus et sans dessous
Vous l’avez constaté, dans l’œuvre de Combas le sexe est partout. Mais il s’agit souvent de « sexe pour rire », manifestation de la frénésie, d’une transe presque bachique qui s’empare de ses personnages.
(petite mise en garde)
A côté des tableaux de Combas, il existe des dessins de toutes les époques. L’acte sexuel y est particulièrement explicite, pratiqué seul ou à 2, voire plus. Ces dessins, dans des styles très divers, sont réalisés à l’encre, au crayon, à la peinture.
Parmi les ensembles qui se dégagent, un travail entrepris avec l’artiste Ladislas Kijno. Sur des photos érotiques, tous 2 interviennent, chacun dans son style. Le résultat confère à ces femmes une dimension presque futuriste.
La série des Vieux Dégueulasses, exposée à la galerie lyonnaise Metropolis durant l’été 2002, compile des dessins de nus d’après modèles vivants ou de plâtre, revus à la manière de Combas. Certains traits sont soulignés, des accessoires ajoutés et des textes particulièrement graveleux occupent le reste de la feuille. Cette série témoigne de l’étonnement amusé de Combas face aux obsessions dévorantes et à l’inventivité sans borne de l’humain dans une époque qui vise à normaliser la sexualité en prenant modèle sur les performances des porn stars. « La différence qu’il y a entre moi et eux, c’est queues sont dégueulasses, alors que moi je suis l’as de gueux ! » (Robert Combas, catalogue de l’expo Vieux Dégueulasses)
Ci-dessous 3 extraits. Pour ne pas vous spoiler la découverte des titres-légendes de cette série, je m’abstiens de vous les dévoiler ici…
Satellites
Depuis 1992, Robert Combas développe des activités parallèles à sa peinture qu’il appelle « pratiques satellites ». Pour la plupart de ces pratiques, il transforme des images préexistantes, des travaux anciens ébauchés qu’il réaffirme, ou d’autres créateurs. Ce peut être à la fois des sérigraphies de Andy Warhol comme des dessins ou plâtres d’étudiants aux Beaux-Arts.
Titre-légende : « Mare d’elle, de tout ce Blues qui coule, du bleu d’accord mais pas des larmes ! Et aussi de ce jaune tour de FRANCE. Et de ce regard de face mordeur à petites dents de moins en moins enfant ! De plus en plus pédant. Et elle se gargarise avec de l’Anizette. « Allez ! Fais pas ta zézette ! », je n’ai plus de sucettes. Je suis trop fatigué de porter les valises. Ça commence à se remarquer du côté de mes yeux. Bonsoir Marylin de mes deux. »
Titre-légende : « Or ! DONATOR PRKLAMOTON BLONPREDATOR BIG BROTHER DE 2984. GEORGES ORWEIL N’ÉTAIT PAS PROF DE MATH MAIS QU’EST c’qu’il écrivait bien. Déjà à cause d’une erreur de calcul pour un cour de tir aux pigeons, il avait pris 6 mois de DÉ-pucelage de PATATES mineures. »
Extrait du diptyque de 50 portraits à l’effigie de Marilyn Monroe, créés entre 1963 et 1967, mesurant chacun 91×91 cm. Andy Warhol, à la fois amoureux de Marilyn Monroe et fasciné par la mort, a débuté cette série peu de temps après le décès de l’actrice en 1962. Point de départ : une photo originale de Marilyn Monroe pour la promotion du film américain Niagara, réalisé par Henry Hathaway et sorti en 1953.
En 1997, la photographie fait réellement irruption dans son travail. Il est invité, avec Ben, à concevoir l’exposition Entre deux guerres en 1998, à l’Historial de la grande Guerre de Péronne. A cette période Combas avait mis entre parenthèse la peinture telle qu’il la pratiquait. C’est à partir d’images préexistantes qu’il altère, recouvre, cache et détruit pratiquement, qu’il en fait une œuvre originale. Combas ne pouvait pas utiliser des images d’archives du premier conflit mondial. Les autorités militaires interdisaient formellement de photographier et de filmer les combats par crainte de voir les images tomber entre les mains de l’ennemi. Combas intervient alors sur des photos du film Mes Croix de bois (réalisé en 1931 par Raymond Bernard), film qui a marqué son enfance.
Titre-légende : « France-Allemagne entre les deux, mon cœur hésite et mon cul répond le Diable à Dieu. »
En 2000, Combas fait photographier le mur de son atelier parisien de la rue Quincampoix, duquel émerge des créatures nées d’une dizaine d’années d’activité. Il travaille également à partir de photos de mode, notamment pour la série Sacho Mado.
Titre-légende : « l’été le bleu, blanche femme, gris de poisson, de poissine. Le mouvement qui bouge, l’éclair de la fermeture ouverte. À l’endroit, à l’envers, le ciel, un corps et derrière, le soleil. »
Fin de l’année 2008, Combas crée une nouvelle série d’œuvres à partir de photographies de mannequins féminins ou d’autoportraits sur lesquels il intervient avec son pinceau. Il interroge ce qu’est la reproduction d’une œuvre, la reproduction de la reproduction, qui à chaque fois grandit, encore retravaillée par la matière et la couleur. Il photographie l’œuvre passée qui devient ensuite la source d’une nouvelle œuvre peinte en grand format, photographiée elle aussi pour finir sur un tirage argentique, puis reproduite en format plus grand. Combas crée ainsi une œuvre à partir de son œuvre et ce en plusieurs générations.
L’expo, intitulée Le Frimeur flamboyant, a regroupé ces œuvres à la Maison européenne de la photographie, à Paris, en 2009.
Titre-légende : « Teinte en blonde et noir, yeux de fusée, teinte de fumée. Peine, ma reine. Cœur à cheval, bouts de seins à pointes de fer, croix noire, luminescence violette. »
Ces œuvres sont aussi des sculptures, des vêtements, des meubles, des crucifix, des urnes en céramiques… venues de la planète de Combas et régies par un principe : la transformation.
Par exemple, avec ses pinceaux peints il fait des petites sculptures où le gaspillage est transformé en œuvre d’art : le pinceau est transformé en crucifix.
Les tatouages académiques sont réalisés à partir d’études académiques des étudiants de Beaux – Arts trouvées aux puces sur lesquelles il redessine, il retatoue avec sa modernité.
Titre-légende : « Le masque de la Quelque chose, parce que la mort ça fait peur. »
Dans Les tableaux reliefs, réalisé à partir de photos trouvées et collées, il travaille la toile en 3 dimensions utilisant les dernières trouvailles de la peinture de loisir. Il encadre ces nouvelles peintures dans du plexiglass et du verre sur lesquels il réintervient.
Cette œuvre fait aussi partie de mes préférées de Combas. J’aime le dialogue qui s’opère entre la photo et le dessin, ce rendu obtenu avec les cernes noirs qui donnent un air de BD humoristique aux légumes, et le découpage du format en vignettes.
La plupart des œuvres « satellites » de Combas font émerger la troisième dimension. Bon nombre de ces Satellites cristallisent les formes à venir, qui à cet instant sont présentes dans son « laboratoire ». Toujours est-il que ces éléments issus de ces expérimentations se transmettent de tableaux en tableaux de manière virale.
Dans la bibliographie vous trouverez un lien pour aller voir les objets et le mobilier imaginés par Robert Combas, édités et promus par Aquestecop.
Religion
En 1987, Robert Combas est tout juste trentenaire. Il s’est écouler une dizaine d’année depuis son entrée aux Beaux-Arts de Montpellier, années d’intense production, ponctuées de nombreuses expositions et évènements de toute sorte. Au mois d’avril de cette même année, le CAPC de Bordeaux consacre à Combas une grande rétrospective. Combas éprouve le besoin de faire le point et de se renouveler.
Geneviève Boteilla, sa compagne et muse qu’il rencontre en juin 1987 (voir rubrique « Femmes »), va ouvrir Combas à une certaine spiritualité. Ensemble ils visitent des églises romanes et gothiques, s’intéressent de près à l’art religieux, particulièrement au symbolisme de la sculpture médiéval et à l’art de l’icône. L’alchimie et les peintures bouddhistes les passionnent également.
Combas, qui retrouve alors un de ses anciens cahiers d’écolier remplis de dessins à l’aquarelle, reprend certains de ses dessins à l’acrylique et explore les coulures. Sa production s’enrichit de nombreuses œuvres présentant des rideaux de coulures, témoignant d’une pratique plus spirituelle issue des recherches de Combas sur les origines.
Fin 1989, en vue de l’exposition à venir à la Wolf Schulz Gallery de San Francisco, Combas réalise une série de têtes de saints dégoulinantes, isolées sur un fond noir. Sur le tableau est peint un faux cadre orné de motifs graphiques dorés. Cette manière de compartimenter l’espace, suggérant les icônes byzantines et les retables de la Première Renaissance, rappelle ses tableaux du Pop Art arabe et ses tableaux peints lorsqu’il était en résidence au musée de Toulouse-Lautrec d’Albi.
« La peinture c’est comme la cuisine c’est la façon qui change les choses mais si c’est bon, même le sucre avec le sel, ça peut se comprendre. Moi, sur cette toile, j’ai voulu prouver qu’on pouvait faire du bon, du vrai, de l’habité avec du sel et du sucre mélangés. Un peu comme si je faisais de la nouvelle cuisine. Voici du bon, du vrai, de l’habité, voici Jésus de Nazareth crucifié de la tête aux pieds entre deux brigands assassinés ! Le tout, c’est défaire vrai par la force de l’honnêteté que ce soit bon, comme si on pouvait goûter, que ce soit habité grâce à la foi d’un créateur givré. »
En 1991, à Paris, 2 expositions des œuvres de Combas ont lieu simultanément.
La Bible, à la galerie Beaubourg, présente des épisodes de l’Ancien testament dans des tableaux au cadre orné sur lesquels Combas inclut parfois des objets, comme des pinceaux par exemple.
Les Saints, à la galerie Yvon Lambert, présente des portraits de saints et martyrs de La Légende dorée de l’italien Jacques de Voragine, et dévoile Le Calvaire façon Combas, toile monumentale de 450x407cm
Titre-légende : « C’est lui qui terrasse le dragon de l’Apocalypse, c’est lui qui a derrière la tête une auréole en forme de disque. Il jeta Lucifer sur la terre et c’est pourquoi on est dans la mer de je sais pas quoi et où ? Oui ! Mais on est dans la merde à cause de ce Luce qui est en fer. Mais l’Archange, d’après ce que je sais, va lui mener la vie dure. Ils vont se chamailler en toute semi-liberté. »
Ce tableau s’ajoute à mes préférés également. Il m’évoque entre autres la peinture sur soie, avec le travail de la gutta, cette pâte colorée ou non qui pénètre la soie, et avec laquelle on vient cerner les formes et faire barrière pour que la peinture ne fuse pas. On peut l’utiliser aussi pour dessiner des motifs, de la même manière que les motifs qu’on retrouve dans L’Archange de Combas.
Têtes de mort
Coups de gourdin fracassant les crânes, coups de feu tirés en tout sens, jaillissement d’hémoglobine… Dans la peinture de Combas, si on meurt, ce n’est pas toujours définitivement.
Ses combattants et leur gestuelle grotesque, les armes à la manière de jouets pour enfant, les éclats d’obus et les trainées de lance-flamme envahissent tout l’espace comme un feu d’artifice très coloré qui nous éclate à la figure.
« D’après une pince en peluche pour mettre dans les bagnoles et un squelette en plastique idem (pour la voiture). Après coup, avec ce tissu rouge au fond dans le style abstrait Mironisé j’ai pensé à un morceau du groupe psychédélique californien JEFFERSON AIRPLANE. »
Le squelette, représentation symbolique de la mort, apparait fréquemment, de manière grotesque parfois et sans se montrer effrayant.
Titre-légende : « Momo, Momom mais c’était qui Momo ? Momo c’était la débrouille, Momo c’est des patates pimentées que mangent les bhoutanais. Momo c’était la vie élastique, Momo c’était les chemins de traverse, c’était la famille, c’était pas un radis, c’était la chasse aux sous-tiffs. Momo c’était la débraille. Il a voyagé, il a volé, tué, il a cuisiné, il a beaucoup pleuré aussi. Le remord en fin de récif, la mort court en fin de récit ? Alors Momo, c’était la mort sèche ? Béh ! Momo maintenant c’est… Jivaro ! »
Combas tient la mort à distance par le rire et un effet de théâtralité très singulier. La mort apparaît comme seulement un état passager vers une renaissance.
Titre-légende : « Comme des fleurs humaines, comme des humains en fleur qui, ayant connu le bonheur de l’épanouissement, commencent à mourir. Points de suspension. Mais la mort est une renaissance grâce aux graines qui repousseront. »
Alchimikum Liberatum
En 1993 Combas expose, au Musée d’Art moderne de la ville de Paris, Du simple et du double. Il présente son interprétation imagée des textes de la poétesse mystique Sylvie Hadjean.
Titre-légende : « L’homme nu a été pourri et pratiquement emprisonné de l’intérieur par une plante vénéneuse qui lui est rentrée par le cul et prend possession de ses entrailles par « en dedans », tout ça diabolisé par les mauvais esprits. Les diables aussi ont des auras et elles brillent autant sinon plus que les autres. Autant que des lampes électriques, autant que les doigts dans la prise. Mais l’être divin prend tout sur lui car il a dépassé le mal. Il est arrivé à le dissoudre dans l’illusion. La plante peut s’agripper et se faufiler n’importe où elle ne sert à rien puisqu’elle n’existe plus. Tout n’est qu’illusion, oui mais en dur ! Encore faut-il le savoir, le réaliser pas vrai ? Tout le monde ne connaît pas le secret de la vérité moi le 1er mais ça doit exister. »
Titre-légende : « Le méditateur, le médita ta moi, le médita lui, le méditasœur. Presque statufié, s’il n’y avait pas son cœur. Rentrée dans lui au maximum, il réinvente des formes et le langage. Semblant de rien en dedan, il est rigolo quand même. Il crée des histoires de conos et salops, des salops abstraits et conos inconnus de formes pour nous mais pas pour lui, nouveau extra téanos ! Assis surle sol, zen au maximum, zen au maxisol. Véritable usine de l’esprit, tuyaux d’échappement nikels, réincurvés vers l’intérieur. Cerveau carrelage brillant et sensibilité exacerbée en même temps que maîtrisée. Un idéal de sérénité. »
A cette occasion Combas dévoile des tableaux parmi les plus étranges et originaux qu’il ait peint. Bien qu’il s’en tienne aux textes (à sa manière !) il y trouve une grande liberté formelle. Certaines de ces toiles sont fragmentées pour des raisons narratives ou alors de divers styles : sorte de synthèse des recherches picturales qu’il a menées depuis du début de sa carrière, particulièrement depuis 1989.
Titre-légende : « Même si il est le fils de sa mère, il est aussi son propre lui-même, fruit des autres vies qui l’ont forgé. Il n’aura de cesse que l’idéal qu’il s’est fixé à l’Aimée, comme Raymond*. Et même si il est sûr de s’être trompé, et même s’il se fait massacrer dans le non-espoir, il gardera une goutte de foi pour retrouver, (même mort), au firmament, son amour inusé, neuf comme aux premiers jours. *Raymond : Pas Poulidor, Raymond Lulle. »
« Un grand souffle parcourt ces œuvres que le regard de parvient pas à épuiser. […] Elles constituent un corpus pictural initiatique dont ne connaît pas d’autre exemple dans l’histoire de l’art moderne et contemporain. Sans doute faudrait-il remonter au cycle du Poème de l’âme du peintre symboliste Louis Janmot (1854, conservée au musée des Beaux-Arts de Lyon) pour trouver un équivalent (certes moins délirant) à cette aventure qui mêle poésie, ésotérisme et peinture. » (Richard Leydier).
Titre-légende : « Monté sur son fier destrier, le tigre à roulettes et pos de panthère, le chevalier bleu transporte la belle influencée par le soleil à corps rouge et slip vert. À cause du guerrier rouge transparent, on dirait un bordel de salade de fruits. »
Natures mortes et vivantes
Je me rends compte, depuis quelques années, que j’aime de plus en plus les natures mortes, particulièrement les fleurs et les fruits & légumes, souvent accompagnés de vaisselle plus ou moins délicate.
Combas peint des fleurs depuis le début de sa carrière, et plus encore depuis les années 90. Les fleurs et les natures mortes marquent une pause dans l’énergie du mouvement perpétuel de son œuvre.
Lorsque les fleurs occupent le second rôle dans les scènes de genre, elles s’invitent dans les interstices, ou encore sont anthropomorphisées, donnant la réplique à d’autres personnages.
Lorsqu’elles sont au-devant de la scène, elles reprennent leur statut de végétal. Combas les dessine avec une précision de botaniste alors que la peinture, elle, coule comme pour rappeler leur beauté éphémère.
Titre-légende : « Iris géant à tête de sexe femelle avec symboles figuratifs simplistes. Étranges formes expressionnistes faites avec spiritualité qui bouge. »
Titre-légende : « Les grandes rouges, les grandes rougeoles, les grandes rougeasse. À la morceau, à la belle Boulaga, à la vert claire et confiture de tiges. »
Cette dernière me plait particulièrement. J’aime le mélange de l’effet vitrail et street art en même temps.
Sujet souvent considéré comme futile dans l’histoire de l’art, le végétal (j’aurai l’occasion de vous en reparler plus tard) est, au même titre que le nu féminin, l’occasion pour Combas de se challenger.
Voici 2 autres œuvres de Combas que j’affectionne autant que la précédente, toutes 2 pour leur gamme de couleurs à la fois dynamique et apaisante. Il y a d’autres raisons, mais elles sont différentes pour chacune de ces 2 œuvres.
Titre-légende : « Dans le vase bleu clair (qui date de la guerre de 14), sont des tulipes spécialement importées de Hollande dans des boîtes en carton entourées de plastique transparent sorties de leur boîte et vendues au client, elles s’épanouissent quelques jours dans l’eau du vase. Puis, elles se flétrissent pour enfin finir leurs derniers jours dans une poubelle en plastique au milieu de détritus malodorants. Voilà comment finit tout le temps n’importe quelle fleur dans un vase, mais ça vous le saviez déjà. »
Quand je regarde ce tableau, j’ai la sensation de regarder une peinture orientale pleine de détails avec toutes ces petites créatures en fond et ce grand disque orange comme un soleil couchant. Le titre-légende me paraît tristounet comparé au réconfort que me procure la vue de ce tableau.
Titre-légende : « Le bouquet de fleurs des champs est admiré par toute une flopée d’hommes bleus qui ont l’air de sortir de quelque part où il n’y a pas grand-chose à foutre. Comme ils ne travaillent pas, ils regardent les fleurs, les sentent, les critiquent, leur pètent dessus et rotent à tout va. Ils imaginent des trucs pas possibles, comme : « comment faire pour s’enfiler une fleur par le pistil ou par la tige ? ». Il faut dire qu’ils sont florasexuels, c’est-à-dire qu’ils ont envie des fleurs comme d’autres on envie des femmes ou des hommes. Certains sont même mariés. Le mec à droite, il est en ménage avec une tulipe hollandaises (mais il paraît qu’il la trompe avec un géranium). En tout cas, il n’est pas sérieux puisqu’il drague les fleurs des champs. »
Dans ce tableau ce qui me surprend toujours c’est le contraste entre le bas du tableau que je trouve froid avec ces bleus et rouge, et le reste du tableau avec ses tons violacés contrebalancés de nuances de vert des tiges & feuillages et les jaunes-orangés des fleurs. En fait, j’ai l’impression de regarder un collage de morceaux de 3 tableaux différents : en bas un fond dans les bleus avec des personnages qui pour certains picolent et d’autres se battent à coup de balles de révolver ; en haut un fond à motif de confettis sur lequel des morceaux de personnages découpés dans des papiers colorés sont collés et cernés de noir, et dont le rouge de l’iris des yeux vient faire écho avec le pot des fleurs ; et ce pot de fleurs jaunes-orangés, collé au premier plan, un pot bien ancré et des fleurs qui semblent en plein mouvement.
Vraiment j’adore ces 2 tableaux !
Exercices de style
En 2009, Combas transcrit des extraits de poème en une série de 3 toiles de 250x200cm chacune. Ce triptyque singulier termine une sorte de trilogie artistique : littérature (précisément poésie) – musique – peinture. Comme avec les poèmes de Sylvie Hadjean, l’objectif est de faire entrer dans l’espace de la toile le plus d’actions possibles évoquées dans le texte tout en maintenant l’équilibre de la composition.
Le point de départ : la longue pièce onirique en prose d’inspiration médiévale Gaspard de la nuit, écrite en 1835 par Aloysius Bertrand, poète, dramaturge et journaliste français. Puis, 73 ans plus tard, le compositeur français Maurice Ravel écrit un triptyque pour piano d’après 3 fragments issus du dernier chapitre du poème de Bertrand : Scardo, Ondine et Le Gibet. En 2009, Combas choisie de peindre ces 3 même fragments.
À la même période Combas réalise dans le même esprit quelques œuvres d’après Iberia, composition musicale pour piano du pianiste et compositeur espagnol Isaac Albéniz. Dans cette suite de 4 cahiers réunissant chacun 3 morceaux composés entre 1905 et 1909, Albéniz y célèbre son amour pour son Andalousie natale. Selon Olivier Messiaen, compositeur, organiste et pianiste français, cette œuvre musicale « représente peut-être le chef d’œuvre de l’écriture pour piano ». Pour l’écouter c’est ici !
Titre-légende : « Yla paîs di Espaniolita. La ninia flamenca yspectacularia. Li epoqua i ti plus jolie. »
« Cet ensemble de tableaux se distingue du reste de l’œuvre par la précision et la délicatesse d’un geste pictural qui relèverait presque de la joaillerie. » (Richard Leydier)
La musique est très présente dans ma vie et ce depuis toute petite. J’ai eu la chance d’étudier le piano pendant des années, mais vraiment des années. Ibéria est dans mon top 10 des pièces que j’écoute souvent et que j’aurais rêvé de réussir à jouer et interpréter, avec la Pathétique de Beethoven et les études de Chopin en tête de liste depuis toujours ! D’ailleurs il y a un très beau film américano-britannique, Luddwig van B., avec Gary Oldman qui joue le rôle de Beethoven, réalisé par Bernard Rose, sorti en 1994. Pardon je divague.
Vous êtes toujours là ? L’expo n’est pas terminée !
Sans filet… 2010-2012
La foule se presse à la galerie Guy Pieters, avenue Matignon à Paris. Nous sommes en mai 2010, a lieu l’inauguration de l’exposition Sans filet, les Goulamas sont dans le trou, exposition qui signe le retour de Combas sur la scène parisienne.
Ses œuvres, principalement de grands formats, sont une fois encore l’interprétation d’un texte : Le paradis perdu, poème écrit en 1667 par le poète et pamphlétaire anglais John Milton. Une modification importante de ce poème est faite en 1674, nouvelle version dans laquelle le chapitre 12 décrit la chute d’Adam et Eve sur Terre. Ce texte traduit en français par Chateaubriand, lors de son exil en Angleterre, traite de la vision chrétienne de l’origine de l’Homme. Il évoque la tentation d’Adam et Ève par Satan puis leur expulsion du jardin d’Éden.
Dans ses œuvres, Combas représente l’imprescriptible déchéance avec des corps dans une chute dans fin d’anges déchus tombant dans le firmament étoilé.
Titre-légende : « Il tombe au centre d’un défilé de mode de pinups aux canons techniques ou plutôt techno un peu rétro, un mélange de look d’époque de la nôtre et un peu passé. Du rêve tactile qui frappe le sens comme un stylet, des petits coups frappés du bout en acier qui fait éclater les idées à en avoir des gerçures d’azur sur des lèvres carminées. Une bouche éclairée de mille feu follets, du rouge à lèvre rouge comme un sang en veine qui se ballade en liberté dans un corps plutôt mûr qui n’arrive plus à voler même dans ses rêves les plus purs. »
On retrouve dans ces œuvres le regard des têtes remodelées des oeuvres satellites, avec des corps qui semblent parfois découpés dans du carton et collés sur la toile, créant un effet de 3ème dimension qui accroit les sensations d’expulsion et d’entropie.
Seul le pégase Grand Dadais parvient à s’élever et parcourt discrètement l’œuvre de Combas. On le retrouve entre autres dans le vitrail Dormeur Duval (1993) vu un peu plus haut dans l’article (rubrique « Têtes de mort »).
Titre-légende : « Les grands départs c’est pour les poètes… La crinière en avant, les étoiles dans le vent. Le cheval fraîchement se mouvoit dans le ciel, l’air en transe. À vue de nez c’est le mois de juillet. Les lumières au loin, pleines de questions illuminent en petits carrés éclairés de mystères, ceux des yeux de l’enfance questionnant le néant. Magistères à foison. Le cheval vole au loin, c’est un Pégase né avec des ailes blanches et un cou doré, il vient comme un mirage montrer aux créateurs imaginateurs que la seule façon de rêver, c’est de créer ! »
D’autres tableaux suivent aux œuvres « Sans filet » pendant l’année 2011. Combas réalise, entre autres, Le Succube percé de flèches, d’ailleurs repris pour l’affiche de l’exposition !
Titre-légende : « C’est pas vraiment la vérité ? C’est pas vraiment la réalité. Mais c’est joli à regarder. Ça peut pleurer à la rigueur. Mais ça n’a pas très grande valeur. Y a pas de fente à l’extérieur. Y a pas de trou, rien du tout. C’est pas vraiment qu’elle a du cœur. C’est très rugueux à l’intérieur ? Ça semblait doux pourtant ailleurs. C’est très bizarre quand ça se marre. Mais attention ce n’est pas un jeu ; Quand elle vous susurre à l’oreille des falbalas merveilleux. Mais oui, vous l ‘avez compris, c’est pas cucube. C’est un succube. »
Ce qui occupe Combas ces derniers mois de 2011, c’est cette « rétrospectlive » lyonnaise, la musique et les films.
Titre-légende : « Le grand chien chien en guise de cheval, fabriqué en tapage de jaune. La Damoison magicienne à la maison, en sortie dans la rue bleu de nuit avec ses copines dont une nièce par Ali Ansseu. Managée par lui car elle est femme du chaude Bise à Nez (chowbizness) et elle fait chanter les cons. »
Titre-légende : « La jeune fille rousse aux cheveux rouge est aculée par la femme noire au gros saint de brousse. Elle, on dirait un mec parce qu’on sait pas ce qu’elle fabrique en bas de sa ligne du milieu. C’est normal, elle connait que deux dimensions et pas trois. Comprenne qui pourra ! »
Titre-légende : « Ça n’en finit jamais, éternelle fin de merde. Le fini du destin, pas besoin d’être Giscardien pour comprendre cette image du tombage en mirage de l’homme aussi con qu’un fromage qui va payer l’addition par million. Les visages, la mare de têtes, plein des autres, raz les couilles, et même raz le con, et encore bien que en terminaison ce serait mieux peut être comme Charles Buko… de finir en microscopique en rapetissant et en disparaissant dans la fente publique après un concert érotique avec une femme publique. »
Ce personnage a été redessiné sur la façade du macLYON à l’occasion de l’exposition.
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3ème niveau
Lorsqu’il quitte Montpellier pour Paris, Combas emmène avec lui 2 petites valises : l’une remplie de ses dessins, l’autre de 45 tours. Cette valise décorée par ses soins et pleine de vinyles est d’ailleurs présentée dans l’exposition. A ce jour, sa collection compte plus de 7000 disques ! « La musique est essentielle dans ma vie. Mais en fait, je n’écoute plus de musique depuis que j’en fais moi-même » confie-t-il à Stéphanie Loeb, dans son article «Robert Combas : l’interview rock’n roll».
Après l’aventure avec Les Démodés, créé en 1979, vient celle du groupe Les Sans Pattes, créé en 2011. Ce nouveau groupe est composé avec les musiciens Lucas Mancione, rencontré lors de la préparation de l’exposition Sans filet, les Goulamas sont dans le trou, à la galerie parisienne de Guy Pieters, et le bassiste Pierre Reixach. Fort de 40 titres aux sources d’inspiration diverses, le groupe se produit pour la première fois à Sète en 2011 à l’occasion des dix ans du Miam (Musée International des Arts Modestes), et au festival de poésie Voix vives de Méditerranée.
Entre toutes les figures tutélaires du rock, à la question « quel est votre musicien favori ? », Robert Combas répond : « Tous les chanteurs noirs, la musique classique avec des voix, les Beach Boys, Brian Wilson, Phil Spector, John Lennon, Charles Trénet… Il y en a beaucoup d’autres ». Parmi ces autres, le sétois Georges Brassens, auquel il consacre plusieurs de ses tableaux.
Musiques !
Comme je vous le disais en introduction, Robert Combas a fait partie du groupe Les Démodés, créé en 1979, avec Ketty Brindel et Richard Di Rosa dit « Buddy ». Le groupe perdure jusque dans les années 80. Ils donnent une quinzaine de concerts de musique destroy mêlant pop et dadaïsme, puis se séparent.
Titre légende : « Avec corps et puis tête, corps mais pas tête, non c’est corps de chasse. Ha ! Cor et à cri ! Un cri dans la nuit ! Enfile tes palmes et plonge dans le ruisseau. La rivière en seau d’eau et en déchets de cabinet et d’éviers. Et la blonde électrique malgré son corps de Fer chaud va quand même défoncer la salle et les gens, elle va les chaud Fée avec sa musique prête à danser. C’est pas vrai mais c’est pareil, mais pas des PAS RAYÉS (les disques évidemment) ».
Le thème musical est le thème la plus récurrent dans l’œuvre de Combas. « La mélomanie investit l’artiste à l’adolescence, et c’est presque là un phénomène de possession démoniaque » (Richard Leydier). « Ma peinture, c’est du rock, la recherche du feeling. Le feeling, c’est le rythme. C’est le batteur fou dans la jungle et les danses vaudous. Ce sont les Rolling Stones copiant les vieux morceaux des Noirs, des bluesmen et qui, sans le vouloir, créent une musique nouvelle. »
Parmi les rockeurs vénérés par Combas, des personnalités telles que David Bowie, The Velvet Undergroung, Iggy Pop…
Pour autant Combas écoute toute sorte de musique : du jazz, du classique, des symphonies, de la salsa, des Chicanos, de la tarentelle calabraise entre autres musiques folkloriques… Si vous êtes abonné à Rock & Folk, il y a son interview dans la revue de février 2012, rubrique « Mes disques à moi ».
Titre-légende : «Spécialement venus de leur pays natal voici : « Les dragons en plastique.»»
Vue de face sur les 6 tableaux SANS TITRE, 2008-2011, Robert Combas & Ladislas Kijno, technique mixte et guitares en sérigraphie sur photographies tirage argentique – 146x113cm chacune (je vous ai parlé du travail en co-créations avec Kijno un peu plus haut dans l’article, au 2ème étage « Le sexe sans dessus et dans dessous »). On aperçoit aussi sur la gauche, entre autres, LE COQ CHANTANT (1987, acrylique sur toile – 241-163cm). Sur ce 3ème étage les murs sont tapissés des pochettes de vinyle de Combas.
Ce tableau compte parmi mes préférés également. A chaque fois que je le regarde je découvre 1001 détails… le visage dessiné sur la lune, ces taches jaunes et rouges cernées de noir sur le fond violet m’évoquent des yeux. Dans la partie de droite sur fond orange, il y a cette multitude de petites bestioles violettes qui grouillent et tranchent avec l’aspect géométrique des notes de musique noires sur fond blanc. Noir et blanc qu’on retrouve en avec le clavier du piano, un peu comme les collants Catherine Ringer dans les 80’s ou le costume de Beetlejuice, personnage fantastique de Tim Burton dans Beetlejuice, sorti en 1988. Et ce pianiste jaune et noir m’évoque Serge Gainsbourg, plus précisément le personnage animé haut en couleurs du film de Joann Sfar, Gainsbourg (Vie héroïque), sorti en 2010.
Titre-légende : « Sexe en boîte de nuit, Danse et fait la machine I like a sex machine Be on the meuchine J’aime le sexe machine. Hommage à James Brown, Sex machine. »
Ce tableau, tout comme LE PIANISTE, a servi de modèle pour l’édition d’un des tapis tuftés main en pure laine fabriqués en séries limitées. Pour vous donner une idée plus précise, celui-ci est édité en 8 exemplaires et 4 épreuves d’artiste. Dans la bibliographie vous trouverez un lien pour aller voir les objets et le mobilier imaginés par Robert Combas, édités et promus par Aquestecop.
Au premier plan une CHAISE TRAINEAU, sculpture en aluminium poli – 182x65x50cm, Combas en a fait 8 entre 2003 et 2018 (on en aperçoit une également sur la gauche). Sur la droite vue sur L’ORCHESTRE SYMPHONIQUE, 1995, acrylique sur toile et sculpture acrylique sur carton – 307x550cm & 133x100cm. Titre-légende : « L’orchestre symphonique « Les Mâles de Ambourg » et La Cantatrice Chauve. »
En 1992 il rend hommage à Georges Brassens en transcrivant, de la même manière qu’il le fait avec les poèmes de Sylvie Hadjean, certaines chansons telle que Gare au gorille, Les Amoureux des bancs publics… L’exposition La Mauvaise Réputation qui a lieu à Sète, regroupe ces tableaux dans la galerie « Sur le Quai ». Je n’ai pas osé vous montrer son interprétation du gorille, enfin c’est surtout le titre-légende de ce tableau que je n’ai pas osé vous indiquer ici.
Combas n’a jamais cessé d’écrire des textes et de jouer. Il souhaite monter un nouveau groupe. Combas remonte donc le groupe Les Sans Pattes en 2011, avec Lucas Mancione et Pierre Reixach.
La diversité des styles musicaux écoutés par Combas se retrouve dans le répertoire des Sans Pattes. Leur style est d’un éclectisme vivifiant, une sorte de musique « électro libre » suggère Richard Leydier, en écho à l’appellation « figuration libre ».
La filiation entre sa peinture et le rock est particulièrement visible lors de cette rétrospective de 2012 où le rock domine. Côté texte on retrouve, tout comme dans sa peinture, l’amour, le Sud, le mysticisme, les fantasmes érotiques… Parfois les guitares saturent, à la Alan Vega, comme dans Un amour à la Serge Gainsbourg. (cliquez sur la photo pour écouter la chanson et voir la vidéo)
Parfois les claviers synthétiques se font planants évoquant d’avantage la new wave des 80’s, notamment The Cure ou dans certains morceaux de rock alternatif tels que Where is my mind de l’album Surfer Rosa des Pixies, sorti en 1988.
S’ajoutent au répertoire des Sans Pattes des chansons d’amour très épurées comme Je t’aimerai toute ma vie. (cliquez sur la photo pour écouter la chanson et voir la vidéo)
Cette chanson, je la trouve vraiment magnifique ! Au-delà du titre, les paroles sont une vraie déclaration d’amour. La douceur de la musique me fait penser au générique mythique composé par Angelo Badalamenti pour la série Twin Peaks de David Lynch, sortie en 1990.
Il y a aussi Ton visage créé par moi, chanson en hommage à Phil Spector, qui est douce. (cliquez sur la photo pour écouter la chanson et voir la vidéo)
Dans d’autres morceaux, comme Europe ou Préférence de toi, on retrouve de la techno « euro-beat », variante de techno popularisée à partir du milieu des 80’s. Indiscutablement leur musique ne doit pas être jugée qu’avec les seuls critères de l’industrie musicale mais bien d’un point de vue artistique global. Chaque clip, chaque concert sont une vraie performance au sens artistique du terme.
Quand on écoute Les Sans Pattes tout en regardant les œuvres picturales de Combas, on se rend compte de l’incroyable richesse de leur œuvre musicale. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai eu un vrai coup de cœur pour cette exposition et que j’y ai passé autant d’heures !
La complicité avec les peintures se voit explicitement dans les courts films réalisés à la manière de clips. Le principe de base est toujours le même : 1 plan fixe sur le groupe jouant en play-back, parfois réduit à Combas et Mancione, ou augmenté d’invité qui jouent les guest-stars des chorégraphies. Pour chaque film l’éclairage et la décoration sont travaillés, souvent avec les moyens du bord, ce qui donne des résultats très surprenants ! On le voit bien dans le clip de Ton visage créé par moi que je vous ai mis plus haut : des toiles de Combas sont installées à l’arrière-plan comme un décor de théâtre…
D’autres clips sont encore plus « fous » ! Un autre exemple, dans Le Général de l’armée des déçus de la vie, un duo de gyrophares démultiplie les ombres des musiciens par un effet stroboscopique. (cliquez sur la photo pour écouter la chanson et voir la vidéo)
Bref, les procédés créatifs ne manquent pas et se sophistiquent. Dans Partir marcher toute la nuit, un jeu visuel complexe entre les ombres vidéoprojetées et réelles superpose les plans pour nous égarer dans les labyrinthes des mises en abîme. Ces clips sont toujours de véritables tableaux animés.
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Tentative de conclusion !
« Ces liens féconds entre peinture, musique et vidéo nous amènent à nous interroger une fois de plus sur les opérations de « traduction » à l’œuvre dans l’art de Robert Combas. Ce dernier écrit les textes de ses chansons à partir d’images mentales (et parfois de tableaux plus anciens), de la même manière qu’il rédige un titre-légende pour chacune de ses toiles. Par ailleurs, les films ramènent les chansons dans le domaine de l’image en leur donnant une forme visuelle – ajoutons que toutes ces opérations sont bien entendu vectorisées par la musique. Cette circulation des contenus entre divers langages (pictural, textuel, filmique, musical), ces renversements qui sont autant de transmutations alchimiques, tout cela est proprement passionnant et vertigineux. L’œuvre se retourne, s’enroule sur lui-même. Il n’a pas fini de nous étonner » (Richar Leydier, catalogue de l’exposition p.348).
Comment Robert Combas ressent-il d’avoir pour lui seul un tel musée pour la première grande rétrospective consacrée à son œuvre ? « C’est pas assez ! Je dis ça parce qu’il avait beaucoup plus de tableaux à mettre, mais bon… Je sais pas comment le prendre, moi je ressens les choses après coup… Mais en France, on peut pas dire qu’on me met le tapis rouge ! » Soucieux du sens de cette rétrospective, il précise : « La création déclinée en 30 ans de travail qui, j’espère, remettra les pendules à l’heure au point de vue : Art, intensité de Travail, Vérité et Diversité ». (Propos recueillis par Stéphanie Loeb dans l’article « Robert Combas : l’interview rock’n roll »).
En 2018, lors de son interview avec Harry Kampianne pour la Gazette Drouot, le refrain n’est plus le même. « Quand je disais que ma peinture, c’est du rock, je le pensais dans sa globalité. Je peins comme si je faisais du rock, c’est une attitude, une généralité. Ça peut paraître idiot de lancer ça, surtout qu’à l’époque je ne comprenais pas bien l’anglais, ce qui ne m’empêchait pas d’être à l’aise avec cette musique. J’en ai aimé l’ambiance et cela me permettait de me déconnecter du réel. Au bout d’un moment, j’ai eu besoin d’extérioriser tout cela et de savoir de quoi j’étais capable en tant que musicien. Je pense que mes tableaux actuels sont plus affiliés au jazz, pas tous bien sûr, mais il y a cette sensibilité. »
En octobre 2020, à l’occasion de sa 42ème édition, le Rhino Jazz(s) festival comptait présenter Le grand Barouf du Rhino, à la Grande Usine Créative, La Cité du Design à Saint-Etienne. Suite à l’évolution de la situation sanitaire Covid-19, le festival Rhino Jazz est reporté sine die. Je vous en parle quand même !
Véritable aventure artistique, le Rhino Jazz(s) Festival se présente comme un parcours musical et iconographique jazz/pop/rock qui nous fait voyager dans les sixties, le rock dit expérimental, le jazz et le free jazz. Une exploration libre et foisonnante imaginée par des artistes visionnaires et passionnés à la créativité sans cesse renouvelée. Performances, expositions, improvisations et concerts seront là omniprésents sur les lieux.
À cette occasion, Combas exposera une sélection d’œuvres réalisées entre 1980 et 2020. Ce lieu sera à la fois une installation et un laboratoire expérimental pour un dialogue entre musiques et images. Il se prêtera au jeu de l’improvisation avec le musicien-performer Lionel Martin. À la manière d’un musicien de free jazz ou d’un rockeur d’avant-garde, Robert Combas s’exprimera en fulgurances graphiques qui feront écho à cette aventure artistique singulière et au lieu qui va l’accueillir. Il sera également sur scène avec son groupe Les Sans Pattes pour un concert performance.
Actuellement des toiles de Combas ayant pour sujet Georges Brassens sont recherchées pour une prochaine exposition [Avis de recherche publié le 24 mars 2021 sur le site officiel de Robert Combas].
Plusieurs d’entre elles ont fait partie de l’exposition La mauvaise réputation à Sète en 1992. Ces toiles rendent hommage aux chansons de Georges Brassens, d’autres ont pour sujet Sète. Combas souhaiterait les rassembler à cette occasion. N’hésitez pas à les contacter via brassens@combas.com
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Bibliographie (non exhaustive) :
Nos années 80 (du 16 juin au 5 novembre 1989), catalogue d’exposition, coédition Fondation Cartier, Jouy-en-Josas / Beaux-Arts Magazine, Paris, 1989.
Combas. La musique et touti cointi, Paris, 1995
Robert Combas, Maïten Bouisset, Fall Edition, 1999.
Combas, une posture esthétique, « Robert Combas. Les années 80, l’invention d’un style », Paris / Louviers, 2007, par Michel Natier.
Robert Combas, Le Frimeur flamboyant, Richard Leydier, Editions Linda and Guy Pieters, 2009. Extrait disponible sur le site de la MEP.
Robert Combas – Greatest Hits, « on commence par le début, on finit par la fin », catalogue d’exposition, commissaire général Thierry Raspail, commissaire invité Richard Leydier, Somogy Editions d’Art, 2012. Pour feuilleter le catalogue, c’est ici !
Robert Combas – Greatest Hites, dossier de Presse.
Interview dans la revue Rock & Folk de février 2012, rubrique « Mes disques à moi ».
Article Robert Combas, Greatest Hits. « On commence par le début, on finit par la fin », par Jean-Michel Masqué, site lagoradesarts.fr
Article « Robert Combas prolifère à pleins tubes », par Philippe Dagen, journal Le Monde, 10 mars 2012.
Le site de Robert Combas
Les Sans Pattes, le site : https://www.les-sans-pattes.com/
Les Sans Pattes, TV : https://www.youtube.com/channel/UC0551OKe7LqHg19aCnKQn_Q/videos
Les Sans Pattes, article paru en 2017 sur http://www.3ptit-tour.com/lessanspattes.htm
Les Sans Pattes au domaine de Chamarande par Olivier Kowalsky : https://fr.calameo.com/read/0046145787486269ad7bb
Pour découvrir les objets et le mobilier imaginés par Robert Combas : http://www.aquestecop.com/
Transe et connaissance. Un chamane nommé Combas, Michel Onfray, Paris, 2014.
Robert Combas, les années 80 & 90, catalogue de l’exposition, commissaire d’exposition Laurent Strouk, coordinatrice générale de l’exposition Claire Jeannin, Editions LienArt/Galerie Laurent Strouk, 2016.
Article » Robert Combas : l’interview rock’n roll « , par Stéphanie Loeb, France Info Culture, le 06/12/2016.
Emission Thé ou Café, « Robert Combas », intégrale du 08/01/2017 : https://www.youtube.com/watch?v=Uf_MjuAsgA0
Article » Le théâtre en technicolor de Robert Combas » par Harry Kampianne, La Gazette Drouot, 22/11/2018.
JAZZ : Le 42ème Rhino reporté sine die, Jean-Claude Pennec, 25/09/2020 : https://jazz.lyon-entreprises.com/jazz-le-42eme-rhino-reporte-sine-die/
Portrait de l’artiste dans Tracks sur Arte le 18/12/2020.
Site Paris Art : https://www.paris-art.com/le-frimeur-flamboyant/
Robert Combas reçoit Jérôme Cassou de Télématin dans son atelier, émission du 22/02/2021.
Site web de Hervé Di Rosa
Site web de Ben Vautier
Site de Ladislas Kijno
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